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314 REGISTRES
mouvoir toutes personnes, mesmes et par especial vostre bonté et clémence royalle à pitié et juste commisération.
"Et ce qui rend nostre condittion plus miserable, est l'heur et félicité de noz voisins; lesquelz joïssent d'une paix et abondance de toutes choses, faisans leur grand proffict de nostre trés grand dommaige, et encores que leur estat soit bien petit en comparaison du vostre, comme il est tout notoire.
«Puis donc, Sire, que le secours des hommes, ny l'or ny l'argent, n'a servy jusqu'à present pour nous donner ung repos et tranquilité en ce Royaume, ny pour écarter ct destourner de nous le danger et ruine qui est emynantc et preste à tumber sur noz tesles, nonobstant la bonne voluntté de vosdictz subjectz et notamment des citoiens de vostreditte ville de Paris, lesquelz n'ont jamais failly ny manqué d'ung seul poinct de leur debvoir : l'on ne peult penser dont provient ce malheur, sinon que la guerre que nous souffrons vient du Ciel et n'est autre chose que l'ire de Dieu qui se manifeste.
"La cause de laquelle n'est sy occulle ne lant secrette qu'elle ne soit apparemment remarquée en la corruption universelle de tous les estatz et ordre[s] de vostredict Royaume.
"Car, quant à l'estat de l'Eglise, la symonie y est publicquement et sy impuniment soufferte, que l'on ne rougist point d'intenter procès et aclions pour l'entretenement des conventions sinioniaclcs et illicites; mais malheur adviendra à ceulx qui de mal font le bien et de vice vertu.
"Les benefices ecclesiastiques sont à present tenuz et possédez par femmes et gentilshommes mariez; lesquelz emploient le revenu à leur proffict particulier, et ne font aulcunement celebrer le service divin, frustrant en cela l'intention de l'Eglise et des fondateurs; et n'exercent aucune charité envers les pauvres, contre l'institution et bonnes coustumes des anciens beneffices.
"Les Evesques et Curez ne resident sur leurs bc-nellîces et esveschez, ains délaissent et abandon-ment leur pauvre trouppeau à la gueule du loup, sans aucune pasiurre ou instruction : dont provient que vostre pauvre Peuple se desbauche et desvve de l'ancienne et vraie Religion, et à ceste occasion facillement se destourne et retire de vostre obeis-
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DU BUREAU [i575]
sance, laquelle est principallement fondée sur la vraye Religion et sur la Justice, deux Seulles et fermes collonnes de vostre Septre et Couronne.
«Et sont les ecclesiasticques si desbordez en luxe, avarice et autres vices, que le scandai en est publicq.
"Quant à la Justice, par laquelle les Roys regnent et sont maintenuz, il en reste peu d'aparence et d'ancien vestige au moien de la venalité par trop frequenté des offices de judicature qui est, comme dict Justinien l'empereur, ia vraye source et origine de toute misere el innicquité. Et pour ceste cause, noz voisins, qui ne savent quc c'est de manier tel trafficq, s'en moequent et nous ont en grande ab-homination, au lieu de ce que anciennement noz-dietz voisins se submettoient au jugement ct advis de voz Parlemens et autres Officiers en la judicature, mesmes les empereurs, roys et grandz seigneurs tant d'Allemaigne, Espaigne, Ytallye que autres païs, pour leur pimdhomie, grande science et vertu.
"Et de ce est proceddé la multiplicité et nombre effréné desdictz Officiers, de laquelle vostre Royaume peult dire comme Adrien l'empereur en mourant, que la multitude des médecins l'avoit tué.
" Partie desquelz Officiers sont notoirement incapables, prenant leur façon et instruction aux despens de voslre pauvre Peuple et de la reputation de vostre Estat. Les aulres sont pauvres, et par là induietz et comme contrainctz à choses mauvaises et malhon-nesles : en quoy a esté directement contrevenu au bon conseil de Jethro, beaupere de Moïse, qui luy conscilloit de eslire juges gens de bien, aymans et craignans Dieu, et de bonne conscience, sçavans et capables, ayans cn extreme hayne l'avarice el co-ruptionC.
"Aussy est ledict estat de Justice corrompu^ par la facilité trop grande des remissions et impunité des meurtres, de quelque qualité qu'ilz soient, exci-tans l'ire de Dieu sur nous, devant lequel le sang crie vengence; et semblablement par la facillité des évocations et veriffication d'Eddictz, dont ensuict le mépris et comtempnement de vostreditte Majesté.
"Au regard de vostre Gendarmerie, laquelle à present est remplie de personnes de vil estat, non duittes ny exercitées aux armes, au lieu de ce que an-
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Provide autem de omni plèbe viros polentes, et limenles Deum, in quibus sil veritas, et qui oderint avaritiam (Exod., xviii, 21).
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